Comments / New

Retour sur le mois d’octobre

My name is Olivier Bouchard; I’ve been operating what I think is one of the few (haven’t found another, in fact…) french-speaking stats-oriented hockey blogs out there, En attendant les Nordiques.

Kevin van Steendelaar offered me to contribute some french material to this excellent blog. I happily accepted and so here is the first of a monthly series about the Habs performances. I hope you all enjoy this!

Du spectre des blessures, en passant par une série de défaites ayant causé bien des interrogations sur le statut du coach, jusqu’à la nomination de Carey Price comme joueur du mois dans la LNH (rien de moins!), le hockey est de retour à Montréal.

J’offre ici un petit retour, par le biais des statistiques, sur le mois en question.

Avant tout, je commencerai par présenter les différents indicateurs que j’utiliserai ici. Outre les chances de marquer, tous les autres indicateurs sont aussi disponibles sur l’excellent site behindthenet.ca.

Les chances de marquer

Je compile, depuis le début de la saison 2009-2010, les chances de marquer pour chaque match disputé par le Canadien de Montréal. Pour ce faire, j’ai repris les outils et les définitions développés notamment par Dennis King et Tyler Dellows. Ces derniers ont, au fil de la saison 2008-2009, commencé à recenser les chances de marquer lors des matchs disputés par les Oilers d’Edmonton, utilisant essentiellement la définition suivante:

Est une chance de marquer un tir au but ou un tir manqué pris à partir de l’enclave. Un tir bloqué n’est pas compté comme une chance de marquer, mais un but marqué de l’extérieur de la zone est généralement compté comme une chance.

La zone étant définie comme “l’enclave” est approximativement représentée par le diagramme suivant, tiré de l’excellent site The Copper & Blue.

Hockey_rink_diagram_medium

Pour chaque chance de marquer, je note le moment du match, l’équipe du joueur ayant eu la chance et, s’il s’agit d’un joueur du Canadien, le numéro du joueur. Une fois le match complété, je consigne les chances dans un formulaire construit par Vic Ferrari, du site timeonice.com, et j’utilise ensuite les trois tableaux générés par le script pour générer quelques diagrammes supplémentaires et écrire un compte rendu du match. Voici, à titre d’exemple, un lien vers le billet portant sur la victoire de 4-2 du Canadien sur Boston, samedi dernier.

La compilation des chances de marquer s’est graduellement étendue à d’autres équipes; seulement parmi le réseau hébergeant ce site, SBNation, on retrouve notamment une cueillette des chances de marquer sur les sites suivants: Broadstreet Hockey (Flyers), Blueshirt Banter (Rangers), The Copper & Blue (Oilers), In Lou we Trust (Devils)… Notons aussi Flames Nation, mc79hockey.com… et il y en a plusieurs autres.

Pour ceux qui souhaitent obtenir plus de détail sur ma compréhension des chances de marquer, je me permets de vous référer à une série de questions-réponses faite avec Chris Topham de l’excellent site Lions in winter.

Les tirs vers le filet (abréviation: TVF)

Les TVF sont tout simplement ce qu’on appelle généralement Corsi numbers, c’est-à-dire un +/- basé non pas sur les buts, mais sur les buts + les tirs au but + les tirs manqués + les tirs bloqués. Exprimés en pourcentages, les TVF nous donnent une approximation du temps passé en zone offensive ou défensive.

Quoi que je ne l’utiliserai pas ici, on retrouve souvent les TVF/Corsi sous forme relative, c’est-à-dire qu’on donnera la différence entre le ratio de TVF d’une équipe lorsqu’un joueur est sur la glace et lorsque ce même joueur n’est pas sur la glace. L’idée est ici de voir quel joueur permet à son équipe de dominer le jeu territorial.

Chez le Canadien, Hal Gill et Travis Moen ont des indices de TVF très faibles, alors que Pacioretty et Scott Gomez ont des ratios de TVF très élevés.

Les mises en jeu par zones (abréviation: MenJ)

Les MenJ, appelés Zonestarts par nos confrères anglophones, sont comme les TVF un +/-, basé cette fois-ci sur la zone dans laquelle une mise en jeu se déroule. Alors que les TVF nous donnent une indication de l’avantage du territoire, les MenJ nous permettent de voir qui doit remplir des tâches plus défensives ou offensives.

Les MenJ ont un impact réel sur la capacité d’un joueur à gagner la bataille territoriale; souvent, un joueur ayant un faible pourcentage de TVF sera en fait un joueur ayant pris part à de nombreuses mises en jeu en zone défensive.

Chez le Canadien, Mathieu Darche est un joueur prenant un nombre élevé de mises en zone offensive, alors que Nokelainen, Plekanec et Gill prennent beaucoup de mises en zone défensive.

La qualité de la compétition (abréviation: Qualcomp)

Il s’agit d’un indicateur qui, à ma connaissance, a été développé par Gabriel Desjardins sur le site behindthenet.ca. Il s’agit d’un indicateur basé sur la capacité des adversaires affrontés à dominer leurs coéquipiers. Plus un joueur passe de temps contre les meilleurs attaquants de l’équipe adverse, plus son indice qualcomp sera élevé.

Tomas Plekanec est, généralement, le joueur ayant l’indice qualcomp le plus élevé chez le Canadien. Chez les défenseurs, PK Subban et Gorges sont ceux qui ont les indices les plus élevés. Je n’utiliserai les qualcomp qu’après le mois de novembre parce qu’historiquement, on reconnait que ces indices ne deviennent fiables qu’une fois le quart de la saison jouée.

La mise en contexte étant maintenant complétée, passons au résumé du premier mois de la saison.

À forces égales

Le jeu à forces égales constitue environ 75% d’un match de hockey. Une première chose que l’on doit comprendre, c’est que l’avantage du territoire varie non seulement en fonction des équipes en présence, mais aussi en fonction du score. Dans le tableau suivant, la 4e colonne représente ce que les TVF nous laissent entrevoir comme temps passé dans la zone adverse en fonction du score.

Tableau1_medium

Comme Tyler Dellows l’avait démontré il y a quelques années déjà, une fois l’avance acquise, toutes les équipes se replient en défensive au point de voir diminuer significativement leur avantage territorial. En fait, sur la période allant de 2003 à 2008, seuls Detroit, les Rangers et les Sénateurs (!) continuaient à avoir l’avantage aux tirs à forces égales avec un but d’avance. Avec deux buts d’avance, même les Red Wings, alors au faîte de leur puissance, cédaient l’avantage du territoire.

Sachant cela, le tableau ci-dessus est de bon augure dans la mesure où il nous informe du fait que le Canadien est présentement capable de dominer ses adversaires lorsque le score est égal. Quand même, une fois l’avance prise, la chute est brutale; il sera intéressant de voir si l’équipe parviendra, au fil de la saison, à renchausser partiellement cette partie du jeu collectif.

Lorsqu’on s’attarde aux performances des différents joueurs, le tableau est encore une fois relativement encourageant; les pourcentages positifs abondent. Le tableau suivant regroupe les joueurs par trio (ou par duo pour les défenseurs) et indique le nombre et les % pour les mises en jeu, les TVF et les chances de marquer.

Tableau2_medium

  • Plekanec a eu à subir une quantité proprement stupéfiante de mises en jeu en zone défensive, équivalente à celle des principaux joueurs défensifs de la ligue. Et pourtant, on attend du #14 qu’il produise à l’attaque. Si sa production individuelle n’est pas (encore) ronflante, lorsque Plekanec est sur la glace, l’équipe fait jeu égal au niveau territorial et domine largement aux chances. Sachant qu’on lui demande de jouer soir après soir contre les meilleurs éléments adverses, c’est là un résultat d’autant plus impressionnant. Ses sbires actuels n’ont pas toujours été à ses côtés; si Gionta semble traîner de la patte, Pacioretty présente encore des résultats fort honorables. Reste que je me demande si Martin va continuer longtemps avec cette combinaison, qui prive l’équipe d’élans offensifs plus réguliers de la part du #67.
  • On a beaucoup écrit que Desharnais avait relancé Cole, mais ce tableau nous laisse entrevoir qu’il semble plutôt que ce soit le contraire. Le haut pourcentage de départs en zone offensive du #51 est un héritage des 6 premiers matchs, alors que Martin utilisait Plekanec et Gomez pour protéger le petit centre des départs en zone défensive. L’absence de Gomez et l’insertion graduelle d’Eller au centre a imposé une plus lourde charge à Desharnais, qui en a souffert au temps de possession. Nokelainen a enlevé de la pression, mais il faut le dire: Cole est spectaculaire. Ces chiffres démontrent à quel point le #72 n’est pas dominant qu’à l’oeil nu, les résultats, match après match, s’accumulent de manière convaincante. À le voir dominer ainsi, il n’est peut-être pas loin le moment où il retournera aux côtés de Plekanec.
  • Côté chiffres ronflants, Eller n’a rien à envier à personne. Quand même, on constate que si Martin en parle comme d’un joueur appelé à jouer un rôle défensif, force est d’admettre que le jeune danois n’est pas encore terriblement éprouvé de ce côté. Tout comme Desharnais, il bénéficie de l’arrivée de Nokelainen. Moen a eu de plus lourdes tâches défensives, ce qui tombe sous le sens, alors que Kostitsyn, après avoir passé près de 3 ans à lever de la fonte aux côtés de Plekanec, se trouve maintenant dans des minutes beaucoup plus offensives. S’il n’a pas le flash de Pacioretty ou encore Cole, le Boeuf de Novopolotsk fait parler la poudre aux chances de marquer. La grosse saison tant attendue est-elle sur le point d’arriver? Vu le peu de temps de glace en avantage numérique qui lui est consenti, il est permis d’en douter. Mais une saison de 35-40 points à forces égales serait déjà une importante contribution.
  • La 4e ligne ne s’est stabilisée que dernièrement et, à regarder les assignations défensives des différents joueurs la composant, on comprend que ces gars-là ne jouent pas toujours ensemble. Darche, si son jeu en défensive n’a pas manqué de m’étonner, reste un spécialiste de la zone offensive (une sorte d’opposé de Moen, en fait) alors que Nokelainen est envoyé systématiquement en zone défensive, peu importe la qualité des résultats. Le gars est là pour manger des claques en fond de zone en attendant qu’Eller soit prêt à s’y coller, de toute évidence.
  • Subban a eu droit à une dose inhabituelle de départs en zone offensive, ce qu’on peut attribuer aux nombreuses situations ou le CH a tiré de l’arrière. Qu’importe: le défenseur numéro 1 du Canadien reste celui par qui les choses arrivent. Gorges se tape une belle ligne statistique, mais c’est PK qui chauffe le poêle. On peut bien râler contre ses crampes au cerveau, mais vu son âge et le temps qu’il passe sur la glace, celles-ci sont remarquablement rares et les bénéfices sont massifs. Subban-Markov jouant ensemble à forces égales, en avantage et désavantage numérique, je serais curieux de voir où ça mènerait.
  • Quoique les données ne sont pas ici disponibles, il faut savoir que Gill et Diaz n’affrontent pas aussi méthodiquement les meilleurs éléments adverses de Subban et Gorges. Reste qu’ils ont une lourde tâche à remplir, accumulant à un rythme d’enfer les mises en jeu en zone défensive. Au bout du compte, ils tiennent le coup aux chances, mais je doute que ça dure encore bien longtemps. L’effort est remarquable, il faut quand même le dire.
  • On a beaucoup chanté les louanges de Spacek depuis son retour, notamment pour tous ces tirs bloqués. Fort bien. Mais le fait demeure que présentement, Martin les envoie principalement sur la glace pour des mises en jeu en zone offensive et que le jeune et le vieux déboulent un peu trop souvent jusqu’à leur gardien. Tant et aussi longtemps qu’ils continueront ainsi, Martin ne pourra guère tenter de répartir plus équitablement les responsabilités entre ce duo et celui de Gill/Diaz.

Les unités spéciales

S’il faut prendre les chiffres à forces égales avec un grain de sel, la saison étant jeune, c’est encore plus vrai des unités spéciales. Disons simplement ceci: les débuts sont fort prometteurs.

Tableau3_medium

L’avantage numérique a été le fruit de bien des angoisses en début de saison. Mais le fait est que, si on ramène les performances du club sur une base horaire, on constate qu’ils sont premiers en désavantage numérique pour ce qui est du nombre de tirs accordés et deuxièmes en avantage numérique pour ce qui est du nombre de tirs au but tentés. Lorsqu’on combine les deux différentiels, seuls les Sharks de San Jose font présentement mieux. On verra si ça continue en novembre, mais c’est présentement de bon augure. Élément digne d’intérêt: si la disparité est moins grande aux chances, on doit quand même reconnaître que la tendance y est la même. Encore une fois, c’est de bon augure.

Ramené à l’échelle des joueurs, il est présentement difficile de se faire une idée juste des performances des joueurs. Il ne faut donc pas trop s’énerver avec le contenu des tableaux suivants.

Tableau4_medium

Tableau5_medium

En conclusion

Si le premier mois de la saison n’a pas été de tout repos, ce qu’il nous laisse entrevoir du club est de très bon augure et il me semble clair que les résultats au classement ne reflètent pas la qualité de l’équipe sur la glace. L’équipe semble présentement à même de tenir son bout à forces égales et les unités spéciales semblent aussi émerger comme une force potentielle. Disons que ça rend d’autant plus curieux le départ de Pearn; soit ce dernier a effectivement servi d’agneau sacrificiel, soit, plus simplement, son rôle était déjà plus effacé qu’on ne nous l’a laissé croire. Si les unités spéciales évachent au mois de novembre, faudra revisiter ça.

Du point de vue individuel, il est intéressant de voir qu’on a encore affaire à une équipe en progression. Diaz et Weber ne sont pas encore complètement affirmés, Markov n’est pas encore de retour, Eller n’est pas encore appelé à jouer le rôle le le coach entend lui faire jouer…

Par ailleurs, certains points soulèvent l’inquiétude. Faut que je sois honnête: je cherche des poux, là…

  • La façon qu’on a de présenter Gomez me semble proprement irrationnelle. Le #11 a joué un rôle important pour le club au cours des deux dernières saisons, alors que l’équipe augmentait systématiquement son temps de possession et sa part aux chances de marquer lorsque Gomez sautait sur la patinoire. S’il n’a pas le fini de Plekanec, Gomez reste un élément important de cette équipe et après Plekanec, il demeure à mon sens le meilleur joueur de centre que nous ayons sous contrat. Eller va lui voler son job un jour, mais alors que Martin pourrait déjà utiliser le jeune danois dans des situations plus corsées, il ne le fait pas et se fie plutôt sur Nokelainen, dont le travail est aussi héroïque que moyen. L’équipe de direction du CH a démontré par le passé qu’elle n’avait cure de ce que pouvaient penser les médias et ce que ceux-ci peuvent choisir de présenter comme les désirs du “bon peuple”. Espérons que ça continuera.
  • Gionta, mine de rien, traîne un peu de la patte. Lent départ? Petite blessure cachée? Simple anomalie statistique? On verra.
  • Markov. Au bout du compte, combien de temps restera-t-il dans l’alignement une fois revenu? Gill et Diaz sont présentement dépassés dans le rôle qu’on leur demande. Peut-être le suisse montera-t-il une marche, mais grand-papa Gill, lui, ne changera pas. À un moment donné, quelque part au mois de décembre, on va avoir besoin d’un vrai deuxième duo de défenseurs.

Support Habs Eyes On The Prize by signing up for Norton 360